mercredi 11 juin 2008

La petite ne comprenait plus trop rien… Faut dire qu’après quelques coupes, elle riait bien plus qu’au éclats, et s’accrochait bien plus que de convenance au garrot d’Hubert.

Après une dizaine de minutes de gloussements aux bons mots d’Hubert – et pas des blagues à deux balles, elle lui susurra : « je suis crevée. ». Hubert maudit Rosa en son for intérieur. Il n’avait pas si souvent l’occasion de se pouvoir s’abreuver d’une jeune fille si bien élevée - au veau et à la crème surtout. Il laissa un majordome monter la demoiselle à sa chambre, pour éviter que l’on jase derrière son dos. Et passa enfiler une tenue plus conforme à une escapade dans la lande et l’habitat naturel d’Amargein.

Discrètement, il se dirigea vers la porte, évitant de justesse Bertrand en pleine conversation, qui déblatérait très fort « mais c’est absolument fantastique, nous devons impérativement faire un workshop d’innovation sur le sujet ».

Rosa l’attendait, en treillis noir. Sans un mot, ils commencèrent leur course dans le paysage désert. Au bout d’une bonne demie heure sous un ciel nuageux, sans pouvoir prendre le temps de profiter de l’éclat lunaire, ils virent bientôt se profiler le marais. Amargein habitait tout juste au milieu. Il faisait partie de ses vampires Bio, qui ne croyaient plus qu’aux vertus naturelles des plantes pour garder la santé. ¨Pour peu, il serait devenu végétarien.

Ils s’approchèrent de sa hutte en tourbe, bien trop frustre au goût d’Hubert. Il hurla un grand coup : « Comment va tu vielle branche ? » quand il vit son ami.

Amargein avait bien avancé dans sa mutation. Son corps se lignifiait de plus en plus, et des feuilles poussaient désormais sur son crâne chauve. Il laissait sciemment des parties de lui-même décomposer afin de fournir un humus riche, propre à la pousse, puis se nourrissait un peu de créatures du marais pour stopper le processus. On voyait donc des bonsaïs lui pousser à plusieurs endroits, et sa peau avait pris la teinte d’une écorce. Il était devenu ainsi un être mi-végétal, mi mort vivant, une espèce devenue rare, en ces temps d’urbanisation galopante.

Amargein éructa : « Mais que faites vous là tous les deux, ensemble ? Allez, entrez, vous accepterez bien une petite tisane bio ? C’est plein d’antioxydants, c’est très bon, ça ralenti le pourrissement. Rosa, ma chérie tu dois connaître ça, pour garder un teint aussi frais aussi longtemps ? Non ? Ah bon, je croyais que c’était des remèdes bien de la ville tout ça ? Enfin, tu sais, nous à la campagne, on en sais un paquet. Tiens, ne voilà pas que l’autre jour, je reçois une visite de mon neveu qui viens tout juste de Belfast. Ah quelle belle ville que celle là, il s’y passe des choses absolument étonnantes, enfin, tu sais à mon grand âge, on est bien où on est, non ? » Amargein était un moulin à parole une fois lancé.

Hubert s’apprêtait à répondre sur un ton badin. Rosa ne lui en laissa pas le temps.

D’un coup de griffe, elle décapita net Amargein. Il commença à hurler : « mais qu’est ce qu’il te prend ? », puis se repris immédiatement. Hubert n’aurait jamais cru ceci possible. Elle avait du développer de nouveaux pouvoirs.

1 commentaire:

Anonyme a dit…
Ce commentaire a été supprimé par un administrateur du blog.