lundi 17 septembre 2007

Le bon vieux temps (2)

Ce ne fut pas Rosa, mais sa vielle copine, Sophie la Harpie qui passa par la fenêtre. Comme d’habitude elle était sapée en créateur des serres à la tête. Il faut reconnaître que ce n’était pas facile de s’habiller avec ses mensurations. Deux mètres dix, une paire d’ailes géantes dans le dos, mais Sophie avait toujours été un peu minette et très coquette. C’est sûr que c’était raté pour les escarpins avec ses ergots…Sophie était une vieille amie de couple, et était restée proche de Hubert après sa séparation avec Rosa. Sa condition de Harpie n’était pas facile à assumer à notre époque – surtout pour une folle de shopping comme Sophie. Et allez dissimuler une paire d’ailes de plus de quatre mètres d’envergure sous une robe de créateur…
Sophie minauda un peu – et entra dans la pièce, en laissant quelques plumes dans l’embrasure de la fenêtre.
- "Hubert, mon chéri comment va tu ? J’ai appris que Rosa était revenue ?" dit elle de sa voix mélodieuse.
Hubert grommela.
- "Je sais. Quelques uns de ses ravissants amis sont sortis de leur tombe pour venir me saluer…"
Sophie repris, sans avoir écouté Hubert
- "Je l’ai croisée hier, elle était absolument fascinante comme à son habitude. Je comprends toujours pas comment vous avez pu vous séparer…"
Sophie avait un problème de concentration – elle était incapable de maintenir une attention de plus de trente secondes.
- "Quand nous avons devisé sur ta personne, elle s’est vraiment fâchée…vous vous êtes revus récemment ? "
- "Oh, tu sais, ça fait un bail que je l’ai pas vue… une bonne centaine d’années. "
Ils continuèrent en échangeant des banalités. Sophie continuait à le draguer un peu – mais ça faisait longtemps que Hubert ne l’écoutait plus vraiment. Elle finit par prendre congé après un ou deux verres de Whisky Irlandais, tout en bavardant sur le bon vieux temps et sur la difficulté de s’approvisionner en chair fraîche de qualité. Sophie était toujours là au bon moment et sentait exactement quand Hubert avait besoin de partager quelques souvenirs – les harpies avaient un sens pour ça.

Le lendemain, Hubert partait pour son séminaire en Irlande avec les alcools Pimper. Avion de nuit jusqu’à Belfast, puis un peu de route. Il était ravi de retrouver la lande Irlandaise – la seule chose de valable dans tout ce voyage. Arrivée à l’hôtel – pour une fois ils faisaient ça bien - un château refait à neuf, pas trop éloigné de son ancienne propriété. S'il se rapellait bien, il s’agissait du château de Lord Oligan, qui s’était fait massacrer pendant la grande rébellion de 1641. Hubert sentait que cela allait être très difficile de retrouver tant de vieux souvenirs, sans pouvoir se jeter sur la nourriture comme au bon vieux temps.
Un de ses clients, un simple d’esprit nommé Bertrand le pris et lui fit faire un tour du propriétaire.
- "Oh, très cher Hubert, nous ne vous avons pas présenté à notre nouvelle directrice Marketing…"
Hubert se figea.
- "Bonjour Hubert", fit Rosa.
Hubert repris son souffle et, à l’adresse de son guide :
- "Si… nous nous sommes croisés dans une autre vie…"

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